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DENIGRER SON EMPLOYEUR AUPRES DE SES COLLEGUES DE TRAVAIL, EN DEHORS DE L'ENTREPRISE ET HORS DE TEMPS DE TRAVAIL PEUT JUSTIFIER UNE PROCEDURE DE LICENCIEMENT

24/10/2022

Discussion entre collègues de travail, de nombreux bavardages pourvoyeurs de potins, médisance, dénigrement, commentaires très peu élogieux sur son entreprise ou sa hiérarchie, post sur les réseaux sociaux. Même s'ils relèvent de la liberté d'expression du salarié, peuvent ouvrir à l'employeur bafoué, la possibilité, sous certaines conditions, de sanctionner le ou les salariés qui porteraient atteinte à sa consédération.

I- FAITS ET PROCEDURE : 

Mme [N] a été engagée par la société Carrosserie Chenin en qualité de secrétaire, à compter du 26 Février 2003. La salariée, licenciée pour faute grave, a saisi la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement.

II-LES ARGUMENTS DES PARTIES :

-La salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement s'analyse en un licenciement avec cause réelle et sérieuse et de la débouter de sa demande en paiement d'une indemnité subséquente, alors :

« 1°/ qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (...)

2°/ que sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées (...)

La Cour d'Appel (Poitiers, 20 Septembre 2020) :

1- Le licenciement  de la salariée s'analyse en un licenciement avec cause réelle et sérieuse car " la salariée avait tenu, le 22 juillet 2017, à un collègue et en présence de tiers, des propos dénigrants à l'égard des dirigeants de la société Carrosserie Chenin, de nature à diffuser une mauvaise image de l'entreprise et de ses dirigeants et à créer un malaise caractéristiques d'une violation de l'obligation de loyauté découlant de son contrat de travail, quand la tenue de tels propos, en dehors du temps et du lieu de travail, ne constituait pas un manquement à une obligation de loyauté découlant du contrat de travail susceptible de justifier le licenciement prononcé (....)"

2- la salariée avait tenu, le 22 juillet 2017, à un collègue et en présence de tiers, des propos dénigrants à l'égard des dirigeants de la société Carrosserie Chenin, de nature à diffuser une mauvaise image de l'entreprise et de ses dirigeants et à créer un malaise

Cour de cassation, décision du 15 Juin 2022

1- D'une part, la cour d'appel a retenu qu'il était établi que, contrairement à ce qu'elle soutenait, la salariée avait bien affirmé à l'un de ses collègues, en présence de deux de ses amis, que leurs employeurs tenaient à son égard des propos, blessants et humiliants, selon lesquels il serait « le plus mauvais peintre qu'ils avaient pu avoir dans l'entreprise ».

Ayant relevé que les employeurs contestaient avoir tenu de tels propos et alors que la salariée ne soutenait pas qu'ils l'avaient réellement fait, la cour d'appel, qui a relevé que l'affirmation publique selon laquelle l'employeur aurait tenu de tels propos constituait un dénigrement de ce dernier, a fait ressortir le caractère diffamatoire de ces propos et a pu en déduire que la salariée avait abusé de sa liberté d'expression.

2- D'autre part, la cour d'appel a constaté que, même si ces propos avaient été tenus en dehors du temps et du lieu du travail, ils avaient été adressés à un autre salarié de l'entreprise afin de donner une mauvaise image de ses dirigeants et créer un malaise entre ces derniers et les membres du personnel. Elle a pu en déduire qu'ils caractérisaient un manquement de la salariée à son obligation de loyauté découlant de son contrat de travail et, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le comportement de la salariée constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Décision : POURVOI DE LA SALARIEE REJETEE

Le salarié jouit dans et hors de l'entreprise la liberté d'expression depuis les lois AUROUX de 1982 et d'autres textes (Article 10 de LA CEDH) et article 11 de la DDHC de 1789. Cette liberté a donc une valeur fondamentale et constitutionnelle.

Le code du travail protège également les libertés individuelles et collectives dans l’entreprise. Notamment, l’article L1121-1 du Code du travail prévoit : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »
Pour autant la liberté d’expression rencontre ses limites dans les propos injurieux, diffamatoires ou excessifs.

La Cour de cassation, dans son arrêt du 15 Juin 2022 approuve le licenciement d'une salariée qui avait tenu en public, des propos diffamatoires à l'encontre de son employeur. 

En l’espèce, la salariée licenciée avait affirmé à l'un de ses collègues, en présence de deux de ses amis, que leur employeur tenait à son égard des propos, blessants et humiliants, selon lesquels il serait « le plus mauvais peintre qu'ils avaient pu avoir dans l'entreprise » (en l’espèce une entreprise de carrosserie).

Attention : Les propos incriminés et sanctionnés par l'employeur avaient été tenus en dehors de l'entreprise et hors temps de travail. C'est l'un des enjeux juridiques de cet arrêt

Cour de cassation, décision du 15 Juin 2022 - Pourvoi N°21.10-572

Cabinet RYMO Conseil et Formation

Département Communication et Juridique

 

 

 

 

 

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